Le premier vecteur d’échange entre un corps humain et son environnement est l’air qu’il respire. Nous respirons inconsciemment environ 15 fois par minute, aspirant et expirant à chaque fois environ 1/2 litre d’air. Un homme peut survivre sans manger pendant quelques semaines, sans boire pendant quelques jours, mais ne peut vivre sans respirer plus de quelques minutes.
Nous ressentons parfois de la gêne en respirant de l’air malodorant, trop humide, poussiéreux, pollué, trop sec … Cette gêne est bienvenue car elle nous signale que cet air n’est pas sain pour notre corps.
Nous produisons nous même une partie de cette pollution (par exemple le gaz carbonique que nous rejetons). Cuisine ou produits chimiques utilisés dans la maison constituent d’autres sources de pollution. A l’extérieur, l’air peut être pollué par des émanations naturelles ou industrielles, mais est il est en permanence régénéré par les plantes qui transforment le gaz carbonique en oxygène, les pluies qui lessivent les poussières, et les cycles verticaux d’aller-retour en altitude.
Bref, l’air extérieur est généralement bien meilleur qu’un air intérieur non renouvelé.
Un air de bonne qualité
Pour être bien dans une maison, il faut donc faire sortir l’air vicié et faire rentrer de l’air neuf. C’est ce qu’impose la règlementation depuis environ 40 ans, par le biais d’une ventilation mécanique contrôlée.
Ce système aspire l’air depuis les pièces humides (cuisine, bains, douche, WC) et le rejette à l’extérieur. De l’air frais pénètre dans la maison par les grilles d’aérations disposées dans les pièces de vie (chambres, séjour).
Ainsi, un léger courant d’air balaie en permanence la maison : l’air neuf entre dans les pièces de vie et circule vers les pièces humides où il se charge d’humidité, d’odeurs et de pollution, est aspiré dans les gaines de la VMC puis recraché en toiture. (Rappelons qu’une VMC ne devrait jamais être débranchée : certaines résidences secondaires se retrouvent moisies après un hiver très pluvieux !)
Et le chauffage alors ?
Ce flux qui renouvelle l’air de la maison emporte aussi avec lui les calories intérieures. Ainsi, en hiver, la VMC extrait de l’air à vicié 19° qui est remplacé par de l’air neuf à 5°. En hiver, une maison de 100m² perd en permanence 500 W pour son renouvellement d’air. En Provence, on peut estimer à environ 20kWh/m²/an (soit environ 200€/an) cette déperdition.
En fait, le flux d’air dépasse très souvent cette valeur, pour plusieurs raisons :
– La VMC est au-dessus du volume minimal règlementaire, par construction ou bien par régulation lorsque l’humidité ambiante le justifie ou encore par commande manuelle en cuisine
– D’autres équipements génèrent des flux importants : hotte de cuisine, cheminée…
– Des flux incontrôlés s’infiltrent dans la maison, par de multiples interstices dans les murs, sous l’effet du tirage naturel (l’air chaud intérieur s’échappe par les fissures en plafond et est remplacé par de l’air froid extérieur qui pénètre sous les portes) ou sous l’effet du vent.
Des pistes pour améliorer la situation
De nombreux efforts ont été faits pour réduire les déperditions dues à la ventilation, sans en perdre les bienfaits :
– Réduire la consommation électrique du ventilateur : nous sommes ainsi passés de 10kWh/m²/an à actuellement 3kWh/m²/an et même à 1kWh/m²/an avec des moteurs ‘microwatt’ (une bonne VMC consomme 1€/mois).
– Réduire les renouvellements inutiles : installer des bouches d’aspirations et des grilles d’entrée d’air sensibles à l’humidité, qui s’ouvrent fortement en ambiance très humide et se referment quasiment en ambiance sèche. Ainsi, le débit standard de 30m³/h dans une chambre est réduit à 5m³/h si l’air est sec (chambre inoccupée).
– Réduire les flux incontrôlés :la nouvelle exigence de perméabilité à l’air pour les maisons BBC est inférieure à 0,6m³/h/m² de paroi froide (murs et plafonds).
– Récupérer les calories de l’air extrait, par un échangeur thermique entre l’air sortant et l’air entrant : c’est la ventilation double flux, qui impose un double gainage dans toute la maison et un double ventilateur. Sa consommation électrique annule quasiment les gains des calories récupérées.
– Préchauffer naturellement l’air entrant : puits canadien ou provençal, constitué de tuyaux enterrés par lesquels l’air extérieur circule avant d’entrer dans la maison. A l’heure actuelle, son impact sur la facture d’électricité ou sur le confort n’est pas sensible.
Les efforts vont se poursuivre dans cette direction car les performances des maisons BBC sont telles que toutes les autres déperditions thermiques ont été tellement réduites (murs, fenêtres, toitures…) que le renouvellement d’air devient la source principale de fuites de calories.
Economies d’énergie… oui mais !
Cependant, nous devons garder un peu de recul dans cette chasse au gaspi : les enjeux deviennent de plus en plus faibles et ne justifient bientôt plus les investissements nécessaires. Les améliorations prioritaires sont déjà entrées dans les moeurs. La durée de retour sur investissement des options actuelles est particulièrement longue, supérieure à 10ans. Certaines options n’ont d’avantage ni économique, ni de confort et ne sont choisies que sur des critères psychologiques.
On peut aussi s’interroger sur la pertinence des mesures d’étanchéité à l’air réalisées sur nos maisons. La procédure est la suivante : on bouche toutes les entrées et sorties d’air normales (VMC, hotte cuisine, cheminée), puis on met la maison en dépression (ou surpression) d’environ 50Pa et on mesure le flux d’air qui passe à travers les murs/plafonds/planchers (par les gaines électriques, les évacuations de plomberies…), puis on rapporte ce flux à une dépression (normale) de 4Pa. Si on trouve moins que 0,6m³/h/m², on dit que la maison est suffisamment étanche, et on débouche les entrées et sorties d’air normales.
On pourrait ainsi imaginer une mesure de qualité des passoires de cuisine : Vous achetez une passoire neuve, de retour chez vous vous bouchez tous les trous de la passoire (avec de la pâte à modeler), vous remplissez la passoire d’eau, observez la baisse (éventuelle) du niveau d’eau, et si le niveau ne baisse pas (trop vite), vous enregistrez que c’est une bonne passoire qui ne fuit pas entre les trous. Vous pouvez alors déboucher les trous et vous servir normalement de votre passoire avec l’immense satisfaction de savoir que le flux d’eau par les trous est calibré correctement.
Une climatisation naturelle :
Un aspect actuellement négligé est l’impact de la VMC en été.
Une maison provençale BBC bien conçue (architecture bioclimatique) et bien utilisée (volets) est (presque) complètement protégée de la chaleur en été. L’enveloppe est tellement isolée que la chaleur ne passe pas à travers. Il y fera très frais naturellement (sans climatisation). La seule source d’entrée des calories extérieures est par l’air entrant et notamment par la VMC. Pourquoi imposer une ventilation continue (même faible) par un après-midi de juillet avec 35° dehors alors que l’air intérieur est sec et frais ?
La règlementation actuelle ne prévoit pas de modulation de la VMC sur une plage de 24h. Il serait pourtant plus profitable de réduire très fortement cette VMC l’après-midi, et de laforcer au maximum en fin de nuit lorsque l’air extérieur est retombé en dessous de la température intérieur. Un tel système ne nécessite que 2 sondes thermiques et un processeur, soit quelques centaines d’euros, et serait certainement suffisant dans notre région pour éviter des climatisations beaucoup plus coûteuses.
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